« Bah, c’est trop tard pour porter plainte pour viol » Me Guy NAGEL avocat à Lyon
En êtes vous sur ?
La prescription de l’action publique est le délai à l’issue duquel des poursuites ne peuvent plus être diligentées contre l’auteur des faits.
Le législateur considère que passé un certain temps il n’y a plus vraiment de sens à juger certaines infractions… quel intérêt, en effet, existerait-il à juger aujourd’hui le vol d’un portefeuille commis en 1995 ?
La prescription, c’est actuellement :
-1 an pour les contravention
-6 ans pour les délits
-20 ans pour les crimes
Sauf que les choses, en la matière, deviennent rapidement complexes dès qu’on s’y intéresse d’un peu près.
Tout d’abord, contrairement à ce que l’on pourrait croire, toute loi modifiant la prescription est d’application immédiate : autrement dit, tant que les faits qui vous concernent ne sont pas prescrits, toute loi étendant la prescription trouve à s’appliquer à votre cas.
Prenons un exemple qui a fait l’objet de nombreuses réformes : le viol sur mineur. Il s’agit d’un crime dont la prescription est régie par l’article 7 du Code de Procédure Pénale.
Depuis 1958, cet article a été réformé 10 fois.
Pour l’infraction citée la prescription était de :
-10 ans à compter du crime (1958-1989)
-10 ans à compter de la majorité de la victime pour les viols commis par ascendant ou personne ayant autorité (1989-1998)
-10 ans à compter de la majorité pour tous les viols sur mineurs (1998-2004)
-20 ans à compter de la majorité (2004-2018)
-30 ans à compter de la majorité (2018-2021)
Et actuellement de :
-30 ans à compter – en cas de pluralité de victimes mineures – de la majorité de la dernière victime
Supposons, une personne née le 1er janvier 1981 et qui a subi un viol à 7 ans, le 1er janvier 1988, par un ascendant :
Au jour des faits, la prescription est de 10 ans à compter du crime, soit jusqu’en 1998
– l’infraction n’étant pas prescrite lors de l’entrée en vigueur de la loi de 89, cette dernière s’applique, soit 10 ans à compter de la majorité, soit jusqu’en 2009
– la loi de 2004 trouve depuis à s’appliquer : 20 ans, soit jusqu’en 2019
– la loi de 2018 trouve depuis à s’appliquer : 30 ans, soit jusqu’en 2029
(et idem pour la loi de 2021 : si le même auteur a violé d’autres victimes mineures depuis, la prescription n’interviendra que lorsque le dernier acte sera prescrit…)
Ces faits ne sont toujours pas prescrits alors qu’ils ont été commis il y a 35 ans : la plainte est recevable et un procès pourra se tenir et une condamnation avoir lieu
Il est toujours important :
– de faire le point avec un avocat sur cette prescription qui dépendra de la date de commission des faits, de votre date de naissance et de la nature des faits
– de porter, dans le doute, plainte : en effet, si l’enquête découvre des victimes postérieures aux faits dénoncés, des faits a priori prescrits ne le seront finalement pas…
Toutes les références en commentaires.
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